Éthique

Comme les médecins s’engagent via le serment d’Hippocrate, le Service des Panacées exprime son éthique via le serment de Trotula[1].

Incarnant le Service des Panacées, je promets de faire de mon mieux pour répondre aux troubles énoncés en prescrivant les livres qui me sembleront les plus appropriés, dans une démarche artistique et bienveillante.

En préambule, je reconnais l’insignifiance de mon savoir au regard de l’étendue des possibilités littéraires, écueil compensé par une passion pour la connaissance, les formes esthétiques et leurs expressions livresques, une curiosité ardente, ainsi qu’un enthousiasme pour le partage. Mes prescriptions seront donc toujours forcément lacunaires mais incarnées, propices et motivées. Nous ne cherchons pas l’exhaustivité mais le détail approprié, le déclic, le révélateur.

Je ne suis pas médecin, il va de soi qu’une consultation du Service des Panacées ne remplace nullement une consultation médicale. C’est une évidence qu’il convient de répéter.

Je ne suis pas médecin, je suis « la responsable du Service des Panacées », un personnage composé de livres qui suggère la lecture de livres, dans une approche créative et performative. Cependant, je respecte une éthique inspirée de celle de l’univers médical.

Ainsi, je m’engage à respecter la plus stricte confidentialité. Admise dans l’intimité des personnes, je tairai les éventuels secrets qui me seront confiés ainsi que tout renseignement quant aux troubles énoncés.

Même sous la contrainte, je ne ferai pas usage de mes connaissances contre les lois de l’humanité.

Je ne tromperai la confiance de personne.

Je ne me laisserai pas influencer par les éditeurs, les amitiés, la soif du gain ou la recherche de la gloire.

Je préserverai l’indépendance nécessaire à l’accomplissement de mon action. Je n’entreprendrai rien qui dépasse mes compétences. Je les entretiendrai et les perfectionnerai pour être au service de ma mission artistique et relationnelle.

J’étudierai toutes les possibilités de traitements livresques, mes goûts personnels n’entrant pas en ligne de compte. Je pourrai ainsi prescrire des livres que je n’apprécie pas ou d’auteur·ice·s que je n’aime guère si c’est dans l’intérêt du lecteur, de la lectrice. Il n’y a aucune limite de langue – dans la mesure où le lecteur/la lectrice peut y avoir accès – ni de genre.

Si je ne puis promettre la résolution du trouble, je m’engage à le travailler à travers mes prescriptions dans le sens d’une intensité vitale favorisant un usage et une conscience du temps pleine, animée, peuplée de découvertes et d’émotion.

Que le vivant dans toute sa générosité me soit favorable si je suis fidèle à mes promesses ; et qu’une nuée de retours[2] et autres malédictions s’abattent sur moi si j’y manque.


[1] Trotula de Salerne (1050-1097) ou Trotula de Ruggiero est une médecin et chirurgienne du Moyen Âge qui a étudié à l’École de médecine de Salerne avant de pratiquer et d’enseigner au dispensaire attenant. On lui attribue plusieurs ouvrages dont : De passionibus mulierum ante in et post partum, De curis mulierum, De egritudinum curatione, Practica secundum Trotam.

[2] Le « retour » est un ouvrage invendu renvoyé à l’éditeur via le distributeur s’il en a un ou directement.

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